La réserve parlementaire tente un retour en force
Le retour de la réserve parlementaire s‘apprête à animer les deux hémicycles. Trois députés portent le projet d’une proposition de loi transpartisane qu’ils disent soutenue «par des milliers d’élus locaux » dont l’association des maires de France.
Pascale Tessier
Jugée « Populiste et d’un autre temps » pour justifier sa suppression en 2017, la réserve parlementaire est aujourd’hui regrettée -outre pour son aspect financier- en tant que lien entre député ou sénateur et son territoire. Une absence ressentie si fortement sur le terrain, que des parlementaires s’apprêtent à déposer un projet de loi transpartisane pour appeler son retour de leurs vœux. Ils l’ont expliqué ce mercredi 27 septembre, en conférence de presse à l’Assemblée, avant d’être reçus, en fin de journée, par Franck Riester, ministre en charge des Relations avec le Parlement. En promettant un cadre plus contrôlé -avec déontologues + inscription au Journal officiel + charte d’engagement et une subvention en direction des seules collectivités et associations de petite taille, mais dont le périmètre reste à fixer.
La proposition de loi doit être déposée au Sénat ce jeudi 28 septembre par Laurence Muller-Bronn (LR, Bas-Rhin) et Alain Houpert (LR, Côte-d’Or), mais elle devra attendre la journée de niche transpartisane de cette dernière session 2023, à l’Assemblée nationale.
Pour le moment, sa présidente Yael Braun-Pivet -rapporteure du texte portant
la suppression de la réserve en 2017- n’a pas changé d’avis. Les parlementaires
estiment pourtant que le fond pour le développement de la vie association (FDVA), qui devait remplacer la réserve, reste inaccessible à nombre de projets, d’autant plus lorsque les maires ne disposant pas de l’ingénierie suffisante, renoncent à monter un dossier ou à répondre à un appel à projet.
« Le coup de pouce décisif, l’effet de levier. » Pour Philippe Gosselin (LR, Manche), « On a un panel large de subventions possibles, mais aucune n’a la souplesse de la réserve parlementaire. Le SOS est lancé. » L’appel du pied, André Villiers (Horizons, Yonne), Dino Cinieri (Les Républicains, Loire) et Frédéric Descrozaille (Renaissance, Val-de-Marne) l’ont anticipé puisqu’il y a plusieurs semaines qu’ils ont créé un collectif et lancé une pétition pour le retour de cette réserve parlementaire. « Un pèlerinage que nous entreprenons, à l’image de Saint-Jacques, pour réparer le tissu entre les citoyen et
leurs représentants », a expliqué le député de l’Yonne. Car nombre d’élus sont venus témoigner de projets associatifs qu’ils ne pouvaient soutenir, d’un voyage scolaire à la réfection de peinture d’une classe de village.
Plusieurs ont aussi rapporté se voir reprocher leur absence de soutien financier voire même leur présence – comme Éric Martineau (Modem, Sarthe)- à l’inauguration d’un équipement qu’ils n’avaient pas subventionné, « alors que les conseillers départementaux et régionaux ont des financements possibles », a souligné un parlementaire. « Avec le FDVA, nous avons perdu la proximité, le dispositif est hors sol et il n’y a plus de lien avec les associations comme lorsque nous les aidions à monter leur dossier », a regretté une députée.
Les parlementaires regrettent d’autant plus cette possibilité de soutenir qu’ils estiment, comme Philippe Gosselin que l’utilisation de la réserve était « tracée, même notée sur le site de l’Assemblée et donc publique. » Aujourd’hui, la répartition du FDVA est à la main du préfet, mais « pourquoi n’aurait-il pas d’amis à favoriser parmi les maires ou associations », se sont interrogé plusieurs députés, balayant d’une main le reproche de clientélisme qui leur était fait. « Un préfet n’a pas vocation à distribuer des aides », s’est emporté Philippe Gosselin, « il a bien d’autres choses à faire. » En appuyant le retour de la réserve parlementaire, le sénateur Alain Houpert estime le combat « juste pour le
bien commun. » Pour André Villiers, « le territoire est aujourd’hui orphelin d’un certain nombre d’aides. Il faut redonner du souffle à la vie associative. Quand un député est élu avec 53 % d’abstention, on se dit qu’il faut que ça cesse et qu’il faut retisser du lien. »