Question de Mme Laurence Muller-Bronn (Bas-Rhin – Les Républicains-A) publiée le 13/07/2023
Mme Laurence Muller-Bronn interroge Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité sur les difficultés d’application pour les maires de l’article 70, alinéa 4 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (dite 3DS), instaurant un seuil plancher pour la majoration du prélèvement en cas de non-atteinte des objectifs triennaux relatifs aux logements sociaux.
Les nouvelles dispositions de la loi 3DS constituent en effet un changement de stratégie en créant une majoration minimum qui ne peut être inférieure au rapport entre le nombre de logements sociaux non réalisés et l’objectif total de logements. Or, si les communes ont été informées de cette majoration minimum, dont les objectifs sont d’établir une planification réaliste, ce mécanisme présente un certain nombre d’inconvénients et se heurte aux réalités locales dans son application.
En effet, les communes ont certes la faculté de déduire du prélèvement les montants qu’elles investissent en faveur du logement social. Pour autant, cette possibilité est vaine lorsque la commune peine à atteindre les objectifs non pas par manque de volonté, mais en raison d’une forte contrainte foncière. L’automatisation d’une majoration minime est souvent incompatible avec la diversité des situations locales et réduit fortement l’espace d’échange entre l’État et les communes. Dans bien des cas, la majoration plancher est contre-productive.
Jusqu’en 2020, il n’était pas rare qu’une commune ayant atteint 40 % de ses objectifs se voit infliger une majoration de 15 %, compte tenu des événements qu’a connu la municipalité sur le triennat ou simplement de la contrainte foncière. Avec la loi 3DS, une telle commune se verra infliger au minimum une majoration de 60 %.
De plus, et c’est là toute la difficulté, cette sanction s’appliquera sur le plan triennal 2020-22. Or, la loi 3DS est entrée en vigueur deux ans après que les communes aient fixé leurs objectifs. Ainsi, lorsque les communes ont annoncé, en 2019, leur plan triennal de logements sociaux, elles ne pouvaient pas anticiper qu’une majoration minime serait établie sur la base de leurs objectifs. Elles ne pouvaient pas non plus anticiper la crise pandémique covid-19 et les difficultés économiques qu’elle a engendrées ; notamment la paralysie, pendant plusieurs mois, de la plupart des secteurs professionnels, y compris celui de la construction.
Elles se retrouvent donc piégées par l’application de cette majoration qui va s’appliquer de façon rétroactive en fonction de chiffres annoncées trois ans auparavant, sans aucune possibilité d’anticipation.
Compte tenu de cette problématique, elle souhaite savoir ce que le Gouvernement envisage pour répondre à cette difficulté rencontrée par de nombreux maires dans l’application de cette majoration minime à la période 2020-2022.
Publiée dans le JO Sénat du 13/07/2023 – page 4317
Réponse du Ministère auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité publiée le 12/10/2023
La loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite « 3DS », a apporté les ajustements nécessaires pour pérenniser le dispositif loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain (Loi SRU), le rendant plus soutenable sur les territoires connaissant de forts besoins. Dans le même temps, le législateur a fait le choix d’harmoniser et d’ajuster les conséquences de la carence, notamment par l’instauration d’un plancher de majoration de prélèvement correspondant au rapport différentiel entre le nombre de logements sociaux non réalisés et l’objectif total attendu en début de période triennale. Ce plancher, dont l’instauration avait été recommandée par la commission nationale SRU dans son rapport rendu au terme d’une mission de réflexion sur le dispositif en janvier 2021, est une contrepartie aux adaptations portées par la loi dite « 3DS » sur les rythmes de rattrapage des communes déficitaires. En effet, la mise en carence, qui répond à une non-atteinte des objectifs, ne saurait être motivée par des facteurs sur lesquels la collectivité n’aurait pas de moyen d’action. En outre, son prononcé n’est en rien automatique et doit, à ce titre, constituer une réponse ferme de l’État, notamment sur le plan financier. Dans ce contexte, associer à la mise en carence une majoration de prélèvement correspondant au plancher demeure une réponse raisonnable. Le Gouvernement demeure attentif à la bonne mise en oeuvre du dispositif, et notamment à ce seuil plancher, au service d’un développement équilibré du logement social au sein des territoires.
Publiée dans le JO Sénat du 12/10/2023 – page 5849